Dans un contexte où la transition écologique et le développement économique des territoires sont au cœur des débats, Romain Maillot, Délégué Général au développement de l’axe Méditerranée-Rhône-Saône (MeRS), nous éclaire sur les enjeux et ambitions d’un projet d’envergure : la transformation du port maritime en grand port fluviomaritime de Marseille à Lyon. Son objectif : transformer les corridors de transport en véritables moteurs de compétitivité tout en répondant aux exigences de la décarbonation.
Romain Maillot, vous animez le Conseil de Coordination Interportuaire et Logistique (CCIL), qui a été créé depuis plusieurs années. Quelle est la mission principale de cette structure ?
Romain Maillot – Le CCIL est né d’une volonté politique forte : celle de créer un corridor décarboné, capable de répondre aux grands défis industriels et environnementaux de notre époque. Depuis 2021, nous travaillons à massifier les transports, rendre notre façade maritime et fluviale plus attractive pour les industries, tout en créant des emplois et de la prospérité. Ce projet s’étend sur un territoire représentant 35 % de la valeur ajoutée de la France, avec un positionnement géographique stratégique.
Nous agissons sous l’autorité de la préfète coordonnatrice de l’axe qui est aussi la préfète de la région Auvergne-Rhône-Alpes (AURA) et nous mobilisons autour ce projet de mobilité les parties prenantes – des acteurs portuaires aux grandes métropoles en passant par les entreprises privées. Notre rôle est de coordonner leurs actions, d’identifier les freins et de proposer des solutions concrètes pour faire de ce corridor un modèle de développement durable. Car, il faut le dire clairement : au-delà de la volonté politique, ce projet a un sens parce qu’il présente un intérêt économique réel.
Dans cette mission, quelle place occupe le numérique et la digitalisation ? Est-ce un véritable levier pour atteindre vos objectifs ?
Romain Maillot – Je dirais que le numérique est un moyen, mais jamais une fin en soi. Ce qui compte, ce sont les avantages économiques qu’il apporte. Nous parlons de transparence des flux, de rapidité du transport, et surtout d’une fiabilité accrue pour les acteurs économiques. La digitalisation permet à nos partenaires industriels de mieux suivre leurs marchandises, d’optimiser leurs trajets et, finalement, de réaliser des gains économiques considérables.
L’enjeu pour le CCIL est donc d’identifier les freins, piloter puis mesurer l’ensemble des actions permettant de créer un environnement “pro business”. Nous accélérons, grâce à la mise à disposition de solutions numériques comme CI5, les démarches douanières et la performance économique.
Concrètement, quelles sont les premières avancées du CCIL depuis son lancement ? Avez-vous déjà observé des résultats tangibles ?
Romain Maillot – Absolument. La numérisation, par exemple, est l’un des premiers chantiers que nous avons lancés. Nous avons réussi, avec le support de MGI, à mettre en place une solution qui permet d’assurer la traçabilité numérique des conteneurs entre les ports maritimes méditerranéens et l’ensemble des terminaux intérieurs jusqu’en Bourgogne. C’est tout une communauté logistique qui s’est mobilisé sur ce sujet. Cela nous permet aujourd’hui de garantir la transparence des opérations et d’améliorer l’efficacité logistique.
Par ailleurs, nous avons mis en place un catalogue foncier pour rassembler et promouvoir les opportunités d’implantation sur l’axe fluvial et maritime, financé par CNR, VNF, le GPMM, les ports de Sète et de Toulon.
Sur le plan douanier, nous avons également obtenu des expérimentations en matière de contrôle, avec la possibilité pour les opérateurs de choisir librement leur lieu de contrôle. C’est un progrès significatif qui simplifie considérablement les démarches.
Certains acteurs semblent encore hésiter à franchir le cap de la digitalisation. Que leur diriez-vous pour les convaincre ?
Romain Maillot – Je leur dirais que la digitalisation n’est pas une mode. Elle offre des bénéfices très concrets, comme l’amélioration de l’efficacité et la compétitivité. Pour un chargeur, pouvoir suivre ses marchandises en temps réel est un avantage indéniable. Nous avons des exemples très concrets de ports, comme celui de Marseille Fos, qui ont déjà mis en place ces systèmes et qui en tirent des gains réels.
La digitalisation n’est pas un projet privé pour générer des profits immédiats, mais bien un moyen d’améliorer la compétitivité de tout le corridor. Dans un marché contracté, il faut une action concertée. C’est d’autant plus crucial pour des secteurs comme le vrac, où le transport fluvial peut faire la différence.
Vous semblez donc convaincu que l’avenir du corridor repose notamment sur une transformation numérique et environnementale. Un dernier mot pour conclure ?
Romain Maillot – Le choix est simple : soit nous restons sur une position très défensive vis-à-vis de ces innovations, soit nous investissons dans cette transformation et nous créons les conditions de notre succès. Evidemment, c’est, selon moi, un faux choix. Nous devons nous donner tous les moyens d’être compétitifs, car nos concurrents, eux, n’attendent pas. Seule une pleine coopération de tous les acteurs du territoire, publics comme privés, mais je suis convaincu c’est à notre portée !
A propos du projet Axe Sud
C’est quoi ?
Le projet de Numérisation de l’Axe Sud – MeRS a pour objet de numériser l’ensemble de la chaine logistique de transport entre les ports maritimes méditerranéens et l’ensemble des ports intérieurs du Rhône et de la Saône
Quels sont les enjeux du projet ?
Ce projet doit concourir à :
- Développer la compétitivité des différentes parties prenantes
- Améliorer la Performance des opérations réalisées sur l’Axe
- Veiller à la sécurisation des échanges de données
Pourquoi ce projet ?
Ce projet s’inscrit dans le plan “Marseille en Grand” lancé par le Président de la République – Emmanuel Macron – le 2 septembre 2021. Parmi les grandes orientations du plan, se trouve l’ambition de créer un Grand Port fluvio-maritime sur l’axe Méditerranée-Rhône-Saône. L’ambition a été traduite par le Comité de Coordination Inter-Logistique (CCIL) en 4 axes de travail dont un axe portant sur la transition énergétique et numérique qui héberge le projet de numérisation.